samedi 3 novembre 2012

Ricky Carter et Les Loups Blancs


L’aspirant Clavel, intellectuel égaré dans ce monde de brutes, après avoir examiné en détail l’état des barbes, la propreté des chaussures et le boutonnage des cols, fit mettre toute cette belle jeunesse au garde à vous et lança « 13ème Compagnie rassemblée, à vous mon capitaine ! ».

Le beau capitaine Merlot prit la parole :
« Messieurs, j’ai une déclaration importante à vous faire. A Paris c’est la chienlit. C’est le mot du Président de la République, qui d’ailleurs a disparu. Le Quartier Latin est à feu et à sang. Je n’en dirai pas plus. Toutes les permissions sont suspendues, nous sommes consignés dans la caserne jusqu’à nouvel ordre. Rompez les rangs ! »


Consigné dans la chambrée, allongé sur mon lit, je ressassais mes idées, pas aussi courtes que mes cheveux, n’en déplaise à Antoine. Frida, Georges, Johnny tout cela se mélangeait et je glissais lentement dans le sommeil. Charles mon voisin de lit, originaire de Sauveterre, rouspétait tant et plus et rameutait les autres assis autour de la table et cassant la croûte. Pauvre Charles, il devait partir le lendemain en permission au pays. Il grognait sans arrêt : « Ah, ces fils à papa, ces cons de petits bourgeois parisiens. Qu’est-ce qu’ils veulent ? Savent-ils vraiment ce qu’est un ouvrier ou un agriculteur ? A la radio on apprend qu’ils cassent tout, des bagnoles, des boutiques, des CRS. Ils sont tranquilles eux, leur avenir est assuré. Tandis que moi je dois aider mon père à la ferme. Il faut semer le maïs ».
Moi, de leur révolution je m’en foutais. J’étais malheureux parce je m’étais déjà rêvé une vie de star. Des tournées de concerts un peu partout, l’Olympia, et pourquoi pas le Carnegie Hall, des filles à la pelle et de belles bagnoles.


Et voilà maintenant cette histoire de soulèvement que je ne comprenais pas.

L’aspirant Clavel entra brusquement dans la chambre et me fit signe de le suivre dans son bureau au bout du couloir.

« Asseyez-vous. Pour distraire le régiment, bloqué dans la caserne, le colonel a eu l’idée d’organiser un spectacle. Les gars sont tellement énervés par les dernières nouvelles qu’il leur faut un dérivatif. Et comme on ne peut faire aucun exercice militaire, ni marche, ni sport. Il a pensé que la musique et le théâtre seraient parfaits. Comme je sais que vous chantez et que vous avez trouvé ici trois musiciens avec lesquels vous répétez, je vous demande de nous préparer un petit truc pour demain soir. Vous pouvez bien nous faire une heure de spectacle ? N’est-ce pas ? ».
 
=JOLIS MOIS DE MAI
chap.1, Gérard-Ricky

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